« La Danse des Paroles Interdites », texte/pièce de Jean Dupont, que nous sommes si fiers de publier est une trilogie dans laquelle s’insère « Foi, Folie et Fêlure », qui nous avait – déjà – tant impressionné et enthousiasmé. Ce texte retrouve aujourd’hui son écrin d’origine.

Dire que cette trilogie est un texte important est un doux euphémisme. Jean Dupont a l’art – littéralement – de porter le théâtre en terre poétique. Et vice versa. Ce texte, particulièrement, sculpte le langage avec une telle précision qu’il en devient vivant. Expression théâtrale majeure où les mots se fondent dans le jeu, et où la poésie devient le cœur vibrant de ce qui se joue sur scène, et sous nos yeux de lecteur(trice)s.

Ce faisant, Jean Dupont transcende, et le théâtre et la poésie. Et il se situe très exactement là où la tension de l’oralité et de l’intériorité est la plus forte. Le poème explose dans toute son ambiguïté, son ambivalence fondamentale.

Son voyage silencieux, comme l’exploration du mystère intime, de cette tristesse élémentaire, quasi métaphysique, et sa projection si humaine vers l’altérité. Evidemment c’est dans, et par, l’amour que cette double injonction trouve son expression la plus aboutie.

« La Danse des Paroles Interdites » met en scène la poésie, et déconstruit dans un même mouvement d’une bouleversante beauté, sa capacité à ne pas – pouvoir – dire à haute voix ce que l’on ressent.

C’est la difficulté fondatrice du poème qui se manifeste là. Dans une œuvre absolument renversante, novatrice et fondamentale. La scène devenant le lieu de sa création, puis de sa destruction. A quel point le langage, lorsqu’il est matière poétique, s’élève sans artifice. Par sa seule présence, sa seule existence. Dans toute son incroyable sophistication et fragilité.

Jean Dupont, c’est incontestable, poursuit un travail essentiel, d’écriture et de mise en scène de celle-ci ; dans un même élan, où les mots sont chargés d’une puissance poétique unique.

******

EXTRAITS

Poème écrit sur un plafond

Julien : La liste des souffrances dont chacun de nous est la cause
La liste des souffrances dont je suis la cause
La grande litanie du malheur, de la misère et de la mort
Le chant monotone, répétitif, usé et dérisoire
Le chant au-delà de l’ennui, presque comme interminable,
ah, mais comment m’endormir ?

***

Coule mon amour coule comme une rivière

L’eau : Qui fait des tours et des boucles
Jus : Le jour et la nuit sont-ils une boucle
L’eau : La rivière enseigne-t-elle la danse à la lune et au soleil
Jus : Les rivières se fatiguent-elles
L’eau : Ou bien est-ce la rivière qui est fatiguée
Jus : Le jour et la nuit sont-ils toujours les mêmes
L’eau : Qui dans le cours de la rivière ne font que se retourner
Jus : Chaque instant mon amour
L’eau : A été est sera vécu
Jus : De l’aube au crépuscule mon amour
L’eau : Du jour à la nuit de ton chant coulera la rivière
Jus : Coule mon amour coule comme une rivière
L’eau : Coule mon amour coule comme une rivière
Jus : Descends et monte
L’eau : Desçonds et mente
Jus : Le cours des jours et des nuits
L’eau : Les nuits et les jours sans secours
Jus : Sans recours
L’eau : Sans personne vers qui courir
Jus : Vers qui courir comme une rivière
L’eau : Les nuits et les jours sans amour
Jus : Alors coule mon amour
L’eau : Coule comme une rivière
Jus : L’été assèchera tes eaux
L’eau : Et l’hiver gèlera ta course
Jus : Les paroles coulent de ton amour
L’eau : L’amour coule de tes paroles

******

La Danse des Paroles Interdites – Jean Dupont – Editions QazaQ – ISBN : 978-2-492483-54-7