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~ refuge pour les dépaysés

Les Cosaques des Frontières

Archives de Tag: Yan Kouton

La Nuit Semblait Venue (7)

01 samedi Juin 2019

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La nuit semblait venue, Yan Kouton

La nuit 7

(Une Heure Sur Terre)

Dans notre cocon reconstitué, nous nous sentions étrangement comme des survivants. Mais à quoi avions-nous survécu au juste ? A l’embrasement technologique ? Cela me paraissait tout de même indécent au regard du nombre de maladies vaincues grâce à la recherche. A la bêtise comme une épidémie hors de contrôle ? Au catastrophisme qui ne cessait de se répandre sans que l’on sache précisément ce qu’il finissait par dire. La fin du monde tournait en boucle sur tous les réseaux depuis si longtemps. Les mêmes réseaux nous présentaient désormais, et pratiquement du jour au lendemain, un nouveau monde à portée de main.

Je repensais aux propos tenus par des chercheurs dans les années 2010. A leur vision proprement apocalyptique, directement connectée aux peurs moyenâgeuses. Et je ne pouvais m’empêcher de m’interroger sur leurs motivations. Qui étaient donc ces hommes qui ne croyaient plus aux potentialités illimitées de leur science ? Ils étaient devenus de simples militants, refusant de penser. Des blocs de peur et de menaces. La Terre n’était pas un sanctuaire. Les hommes de chiffre qui n’avaient pas cédé au discours, l’avaient toujours su. La Terre n’était pas un sanctuaire, et l’on pouvait la quitter. La guerre des sciences avait démarré. Et le langage semblait en être la première victime.

Dans le calme retrouvé de notre appartement, je ne parvenais pas à résoudre cette équation. Cette conquête visait-elle le mal, ou courait-elle vers le bien ? L’énormité de l’évolution dressait clairement l’homme contre son créateur. Quel qu’il fût.

« Tu es cinglé » me dit Lina.

Elle me disait souvent ça. Ma folie lui plaisait. Cependant, elle disait aussi que j’aimais trop mon malheur. Alors que l’injustice la révoltait. Sur ce sujet, j’étais sans doute plus fataliste. Sans doute moins politique. Je ne croyais qu’à l’art. Il était évident que la science avait triomphé. Qu’elle se déchirait et se divisait désormais pour la victoire. Le constat était implacable. Les cadavres de ce combat sans merci jonchaient le sol. La littérature était morte, les sciences sociales étaient mortes. Il ne restait debout que la science. La poésie, que je pratiquais, était en embuscade, recluse, en résistance. En attendant des jours meilleurs.

Le pire c’est que je comprenais très bien cette situation. La science disait et elle faisait. Elle promettait et elle tenait ses promesses.  Elle ne se trompait plus et ne perdait plus de temps. Les facultés des lettres étaient désertées, les écoles d’ingénieurs croulaient sous les demandes. Et pour cause.

Le sort des femmes s’était considérablement amélioré quand, en dépit des pressions religieuses et des violences masculinistes en augmentation, la gestation avait basculé dans l’artificiel. On pouvait (ce n’était pas une obligation) choisir de fabriquer son enfant en dehors du ventre de sa mère. Il suffisait de choisir cette solution avant la conception. Tout était prélevé pour qu’un embryon puisse être conçu. Son développement reposait par la suite, et pour les 9 mois réglementaires, sur une machine. Le père et la mère étaient mis d’emblée sur un strict pied d’égalité. Cette possibilité renversa, pratiquement instantanément, des siècles et des siècles de domination masculine.

La Conquête serait d’ailleurs le premier fait historique totalement égalitaire de ce point de vue. Les femmes y participeraient selon les mêmes modalités et dans les mêmes proportions que les hommes. Mercury Voskhod avait lourdement insisté sur ce point. De façon générale, l’installation de la Compagnie sur la Lune serait un modèle industriel absolu. L’ère du divertissement était bel et bien révolue. Tout serait contrôlé, surveillé en permanence. Au nom de la sécurité des milliers de travailleurs lunaires et d’un avenir que l’on ne pouvait plus négliger à ce point. C’était le prix à payer pour l’inconscience passée et la survie de la planète.

L’appétit des mortels avait précipité la planète au bord du précipice. Nous n’aurions pas, grâce à la Compagnie, à souffrir la plus dure des guerres, mais il fallait perdre notre innocence collective. Le déni avait trop longtemps duré. Puis les réactions irrationnelles et violentes avaient explosé, menaçant les fondements des sociétés organisées.

La phase ultime de la reprise en main venait de démarrer. Pour avoir ignoré qu’un repentir rachète, tant au dernier instant que lorsqu’on est loin, les pauvres terriens redécouvraient, effarés et fascinés, la saveur de l’ordre imposé et de l’austérité consentie.  Elle avait le goût d’une surpuissante entreprise. Cela nous pendait au nez, et l’on aurait dû se méfier des discours affreusement culpabilisateurs qui inondaient les réseaux. Ils ne faisaient que devancer cet appel.

Lina reprenait des forces. Et des couleurs.  Comme des milliards d’êtres humains à cette heure, ils nous étaient impossible de parler d’autre chose.

« Combien d’enfants de ma classe ou de mon école finiront dans l’espace ? » … Les meilleurs ont toute leur chance de pouvoir vivre loin d’ici. « Loin d’ici » me reprit-elle… « Tu réalises ce que l’on dit ? »… Loin d’ici ce n’était pas sur un autre continent, ou dans une autre ville…Loin d’ici ça voulait dire loin de la Terre.

« Pour eux, pour les enfants, ça va très vite devenir une véritable raison de vivre ».

Une raison de vivre, ou « la seule possibilité de continuer à vivre ? » me dit Lina. Ils ont tout oublié. « Je t’assure, insista-t-elle, plus véhémente encore, ils ne savent plus rien. Et ne veulent plus rien savoir ».

« Cela deviendra leur quotidien… Le savoir dont on parle restera peut-être sur la Terre tu sais…Je veux dire qu’il n’est sans doute pas destiné à voyager dans l’espace. Quelle utilité a-t-il pour faire décoller des fusées ? Et exploiter des mines ? »

Je ne croyais pas un mot de ce que je venais de lui répondre. Je savais que l’espace ne serait qu’une vaste relecture de ce qui s’était passé au cours des siècles. Tout ce que l’on avait vécu, subi puis acquis. A ce stade, la conquête spatiale promise, on allait la vivre. Tout semblerait fantastique. Et tout le serait en effet. Tellement que les travailleurs propulsés en oublieraient les droits terriens. Il fallait faire table rase. Laver les cerveaux, les mémoires, les consciences. Les préparer à l’impensable.

Et tout de suite après cet accueil, avant le premier pas qui doit les séparer, chaque troupeau s’écrit aussi fort qu’il le peut…

« Donc la Terre ne sera plus qu’un musée et un zoo »…

Qui veillera dans un jour éternel, oui, c’est probable. Pour que la pénitence égale nos erreurs. C’est notre fin mon amour qui est désormais écrite au concours des étoiles.

Je gardais mes belles phrases pour moi. Et je dis seulement que pour l’instant, il était bien trop tôt pour savoir ce que la Terre deviendrait quand elle ne serait plus que notre origine.

Jeff Bezos avait fait de la conquête spatiale la condition de la survie de l’espèce humaine. Je me souvenais parfaitement de cette époque, que l’on appelait maintenant « Le Basculement ». Il était alors question de poser les jalons de l’industrialisation des voyages spatiaux. De mettre en place, pour les générations futures, les infrastructures nécessaires à l’envolée. « Graditim Ferociter »…Pas à pas, férocement, comme l’indiquait le slogan de son entreprise, les choses s’étaient mises en place.

Lina me dit soudainement : « Et si la Terre était le seul endroit de l’univers abritant tant de beauté et d’animaux incroyables ? »…C’était toute la QUESTION. Et toute notre responsabilité. En moi, je me récitais ce passage de la Divine Comédie…Le frein de l’art me dit que je dois m’arrêter…

« Je me posais la même question tout à l’heure. Ils ne parlent que de matières premières. Je suis persuadé que l’univers n’est qu’hostilité ».

Des millions d’êtres humains finiront par vivre là-haut, à brève échéance. Je sais que cela ressemble aux premiers temps de la Révolution Industrielle, quand tout semblait incroyable.

A nouveau, comme une voix intérieure, la Divine me traversait…

Ensuite je revins de cette onde sacrée, régénéré, pareil à la plante nouvelle, qu’un feuillage nouveau vient de renouveler, pur enfin, et tout prêt à monter aux étoiles.

On va monter aux étoiles Lina…Et emporter avec nous ce paradis terrestre.

Texte : Yan Kouton

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Hyperbole

10 vendredi Mai 2019

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Hyperbôle, Yan Kouton

Sur Hyperbole

Hyperbole se veut une réflexion/poème sur les mutations en cours dans l’espace urbain du Grand Paris. Un regard halluciné mais précis sur l’émergence d’une ville nouvelle sur l’ancienne. De là, une pensée sur le temps, sa finitude, alors que la ville est un espace presque éternel. Un espace aujourd’hui augmenté par les réseaux numériques qui se superposent au « réel ». Un réel dont les mutations nous percutent, nous enthousiasment, nous effraient.

Sur le fond, Hyperbole pose la question de notre existence éphémère dans un décor que l’on voit changer irrémédiablement. Cette impuissance face à une méta-ville qui nous échappe, que l’on ne finira jamais de connaître, signe notre condition individuelle et collective. Elle se poursuivra sans nous. Nous y sommes condamnés à la découverte, comme aux déplacements incessants. Happés par un rêve sans cesse modifié. Ce rêve, c’est le grand projet architectural dans lequel on évolue, dans lequel on avance, dans lequel on disparaît aussi. Il nous survivra.

Pour signifier cette désincarnation progressive, cet amour de la ville et cette mélancolie profonde, il fallait une forme narrative à cheval entre le roman/nouvelle et la poésie. Les réseaux de toute nature qui constituent la cité finissent par prendre le pas sur la chair et les âmes. Ces dernières s’effondrent alors peu à peu dans les profondeurs et les strates de ville accumulées. Elles ne sont plus que des traces qui nous interrogent sur le devenir, la fragilité de nos vies précipitées dans les temps nouveaux. La chute apparente des hommes, empruntant le chemin des cendres au milieu d’une mégalopole dévorante et sublime.

Télécharger le livre Hyperbole :   final HYPERBOLE – Les Cosaques

Sur l’auteur

Yan Kouton poursuit avec « Hyperbole » un travail aux frontières de la narration et de la poésie. Aux confins du roman, de la nouvelle et du poème. Comme si l’espace narratif et l’espace poétique ne faisait plus qu’un. Son parcours d’écriture est en équilibre entre observation du réel et réflexion sur le langage, la poésie.

Plus d’informations sur l’auteur :

https://yankouton.wixsite.com/kouton
https://sites.google.com/site/yankouton/
https://fr.wikipedia.org/wiki/Yan_Kouton

 

Texte et livre lié : Yan Kouton

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La Nuit Semblait Venue (6)

27 samedi Avr 2019

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La nuit semblait venue, Yan Kouton

Nuit venue 6

(Une Heure Sur Terre)

Cette organisation s’apprêtait à courir sur des « ondes bien plus belles » que ces quelques tentatives de vivre sur la Lune. Le plus surprenant à ce stade était que les antagonismes entre puissances au sujet de la colonisation de l’espace semblaient avoir disparu. Comme par enchantement. La Compagnie représentait cette nouvelle communauté d’intérêt planétaire après laquelle on courait depuis des décennies. C’était bien sûr trop beau pour être vrai. A moins que nous soyons réellement parvenus au seuil de notre disparition collective.

Cette idée était glaçante. Dire qu’il ait fallu dépasser le stade de l’irrémédiable pour qu’enfin les gigantesques déséquilibres planétaires soient gérés…J’avais conservé ma bibliothèque. Ces « vrais » livres qui étaient devenus si nombreux à un moment qu’ils avaient finalement presque disparu. Ils étaient partout, donc nulle part. La surproduction avait tué l’édition. Il restait bien quelques prestigieuses maisons, mais la plupart vendaient à perte. Selon les pays, les cultures et les choix politiques, le secteur survivait en étant largement aidé, ou il disparaissait corps et bien faute de subventions.

Mon regard se posait sur le livre de Peter Sloterdijk, « Après nous le déluge ». Je me souvenais très bien de son contenu. Ces fameux « temps modernes » tellement attachés au futur, qu’ils se développaient sans racine. Il avait raison. Nous vivions dans un bain numérique étrangement déconnecté des manifestations du réel. Au fond, il avait fallu la proximité ultime de la catastrophe globale pour que notre intelligence collective se remette à fonctionner.

Se développerait là-haut une société hors-sol comme la métaphore de ce que nous étions devenus. Mon cerveau était saturé de reportages qui nous présentaient en images de synthèse plus vraies que nature ce nouveau monde. Un monde assemblé de toute pièce. Un monde qui incontestablement nous faisait basculer. Était-ce une fuite éperdue ? La solution à tous les problèmes que notre existence et notre développement avaient fini par générer ? Je saturais et buggais.

J’aurais voulu ralentir la marche. Prendre le temps d’admirer la dignité de ce mouvement. C’était impossible. La machine en marche était d’une telle ampleur, qu’elle balayait tout sur son passage. Tout devenait soudain infini. Comme si l’on ne pouvait plus décrire la simple réalité. Obscurément, et douloureusement, nous savions que notre condition avait de toute façon radicalement changé depuis que l’univers commençait à devenir concret. C’était venu progressivement, au fil des découvertes toutes plus stupéfiantes les unes que les autres. Chaque année une nouvelle annonce venait déstabiliser notre perception ancestrale. Et plus les connaissances cosmiques devenaient importantes plus notre espèce semblait devenir incontrôlable. Il était trop difficile, j’aimais penser cela, d’imaginer que nous devions vivre dans un espace augmenté. Un espace où la Terre n’était plus que le lieu de notre naissance. Et rien que cela. Le reste était à notre portée. Et nous n’avions plus le choix.

Ce jour était arrivé.

Pour la première fois depuis une éternité, mes appareils et dispositifs implantés disjonctèrent. Oh, pas longtemps. A peine une minute. Une minute suffisante pour comprendre que les 12 réseaux Internet planétaires, superposés et imbriqués, venaient de sauter en même temps. Année après année, il avait fallu renforcer Internet. Puis en augmenter la capacité pratiquement à l’infini. Cela n’avait pas suffi ce matin.

Mon épouse était de retour. Elle n’ouvrit pas la bouche. C’est à peine si je sus qu’elle était là. Quand je l’aperçus, assise en boule dans le canapé, je mis un certain temps à la voir comme une présence réelle. Cette sensation était désormais banale. Je n’étais pas le seul à la partager. Il faut dire que nous étions rentrés dans une ère de transformation radicale. Le réel…Ce qu’il signifiait était de plus en plus confus. Des laboratoires dans le monde entier travaillaient sur des formes génétiques hybrides. Des cellules humaines étaient implantées sur des animaux et vice-versa. C’est comme cela d’ailleurs que le cancer fut totalement vaincu.  C’était objectivement fantastique. On vous annonçait le lundi que vous aviez une tumeur au cerveau. Vous passiez une batterie de tests génétiques dans la semaine et le vendredi, l’injection d’un médicament unique totalement compatible avec votre ADN vous sauvait la vie. Sans même que vous ayez le temps d’avoir eu peur de mourir ou de souffrir.

La mort, « reine jadis du monde », reculait de façon spectaculaire. Le bordel régnait cependant en maître. La science ne pouvait pas tout. Comme Dieu, elle semblait regarder les hommes se débattre comme des sauvages dans cette liberté accordée.

Quand Lina se mit enfin à parler, ce fut pour me dire de débrancher tout ce que je pouvais. Le temps qu’elle se repose un peu. La classe avait été un enfer. Des bagarres avaient éclaté entre les enfants. Certains affirmaient que leurs parents étaient embauchés par la Compagnie, tandis que d’autres élèves mettaient en doute leur parole. Le risque de blessures graves était maximal. Les capteurs prédictifs d’agressivité avaient alerté les enseignants. L’intelligence artificielle déployée à peu près partout était redoutable d’efficacité en lieux clos. Même si elle n’empêchait toujours pas les déflagrations soudaines de violences extrêmes en lieux ouverts.

Je lui demandais comment elle allait aborder le sujet quand l’école rouvrirait. Elle soupira. Me dit qu’elle n’en savait rien pour l’instant. Et qu’il était probable en effet que des parents postuleraient. Elle voyait bien le père d’untel s’envoler, ou la mère d’untel réussir haut la main les différentes sélections. La lutte des classes prenait soudain une dimension particulière. Les familles à problèmes étaient clouées au sol, au sens propre. L’espace s’annonçait sans pitié.

Je m’appliquais à déconnecter tout ce que je pouvais dans l’appartement. Ce qui était une vraie gageure, tant les objets communicants étaient nombreux. Et parfois indispensables. Impossible par exemple d’éteindre le réfrigérateur, sur l’écran duquel défilaient déjà des publicités dédiées. « Avant de partir sur la Lune, faites le tour d’un Mystère » … Ce genre de choses.

La trivialité rattrapait toujours le rêve absolu.

La condition humaine ne changerait jamais vraiment de ce point de vue.

L’appartement était presque redevenu un endroit replié sur lui-même. Un endroit qui n’était plus surveillé, écouté, traqué. Même à notre insu. C’est idiot, mais un sentiment de libération nous envahissait à chaque fois que l’on faisait ça. On se coupait du monde, et surtout de son artefact virtuel. Cette chose augmentée qui avait fait disparaître la nuit et le sommeil.

« Ils auront besoin d’écoles là-haut » me dit Lina.

Cette affirmation me troubla. Comme si je sentais en elle se convertir des frayeurs en espoir.

« Tu te vois travailler sur la Lune ? » lui dis-je à mon tour.

« Les enfants y seront peut-être moins cons…Ici c’est devenu impossible. Leur attention est captée par trop de choses ».

« Ce trop de choses » s’était transformé en un fabuleux projet. Toutes ces diversions venaient d’imploser. La société du spectacle s’achevait brutalement. L’industrie numérique montrait son vrai visage. Celui d’une industrie.

« Et lorsque au ciel ouvert nous sortîmes enfin »…C’était pour rouvrir des mines.

Lina me regardait tristement. Cette tristesse qui était le fruit de la fatigue accumulée. Aucun autre métier que le sien n’avait eu autant à subir les ravages de la transformation technologique. L’envie d’apprendre, pourtant le cœur nucléaire de la Conquête, avait déserté le cœur et l’esprit des élèves.

L’espèce humaine ne serait plus, à très brève échéance, une espèce seulement terrienne.

En s’installant sur la Lune, de manière définitive, nous nous présentions devant l’univers, comme un enfant sur un plongeoir. Le grand saut spatial. L’ivresse de « contempler un jour la céleste lumière, la seule vers laquelle aspire notre ardeur ».

 

 

Texte et image : Yan Kouton

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La Nuit Semblait Venue (5)

10 mercredi Avr 2019

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La nuit semblait venue, Yan Kouton

La nuit5

(Une Heure Sur Terre)

L’armada qui apparaissait au grand jour, rôdait dans nos rues depuis des années. Je me souvenais très bien du scandale international qu’avait provoqué l’introduction en Chine de la « notation citoyenne » et de la surveillance biométrique généralisée. L’ampleur de l’infrastructure technologique nécessaire à ce projet titanesque n’était qu’un banc d’essai. On savait tous à présent que l’on était non seulement filmés mais aussi évalués. Il paraissait évident que les employés lunaires seraient recrutés parmi les citoyens les mieux notés. Les individus les plus stables. Comment en douter, et surtout comment trouver cela totalement anormal ? Cela faisait des années que les autorités et lanceurs d’alerte tentaient de prévenir les populations sur les dangers de la révolte stérile et de la désobéissance civile. Les délinquants et trafiquants eux, étaient depuis longtemps fichés, surveillés nuit et jour. Leur vie était une prison à ciel ouvert. Le pire étant que cela ne stoppait pas leurs ardeurs démoniaques. La drogue et la violence étaient devenues une nation à part entière.

« Les vagues qui cachent pour un temps aux regards des humains le soleil à la fin de sa carrière ardente »…Cette classification généralisée avait surtout servi de paravent à l’objectif. On ne pouvait plus reculer, ni contester quoi que ce soit. Au fond, il n’y avait rien de réellement coercitif. Outre que nous avions tous accepté, en cliquant le plus simplement du monde notre accord, cette situation, qui pouvait réellement trouver anormal que les comportements déviants soient préventivement anéantis ?

Le taux de violence, d’insubordination et de rébellion était devenu pharamineux. Une partie de la jeunesse avait fait sécession, pratiquement depuis l’école primaire. Les adultes oscillaient régulièrement entre tentation populiste et fascisme. Les réseaux sociaux n’étaient plus que des accidents industriels, incapables de régulation, aux mains des pires artificiers de la folie collective.

Les algorithmes, destructeurs et tueurs de masse, s’apprêtaient à nous envoyer sur la Lune. Les relations humaines avaient sombré dans l’abjection, la sauvagerie régnait en maître à peu près partout. Mais la Lune dans quelques mois serait « the place to be ».

Et « comme l’on peut voir, à l’heure où la nuit monte, s’allumer lentement des feux nouveaux au ciel », l’espoir venait de ceux-là même qui nous avaient massacrés sans le moindre état d’âme. Leurs putains de fusées finiraient de détruire la couche atmosphérique qui nous protégeait encore un peu, mais ce qu’elles ramèneraient sur Terre nous sauverait.

Mon voisin programmateur avait relancé une conversation, les informations s’enchaînaient dans ce train d’enfer qui aggravait généralement ma migraine technologique. J’hésitais à me faire une injection. La douleur était devenue une amie. Quelque chose qui me reliait au vivant, au sensible, à mon corps. Ma femme me traitait de masochiste. Je lui répondais, avec emphase, que la douleur m’élevait au-dessus des flots virtuels. Je finissais toujours par me faire une injection de tétraplan, et par prendre une dose nasale de morphine. A l’ancienne. Les vieux anti-douleurs périmés étaient devenus de véritables objets de collection, qu’il suffisait de réactiver grâce à quelques gouttes d’un liquide au pouvoir magique.

Mercury Voskhod s’était lancé dans une démonstration géopolitique. La Conquête était apparue comme une solution rationnelle à la surpopulation. En dépit des épidémies résurgentes, des guerres récurrentes, des violences endémiques, le nombre d’êtres humains ne cessait de croître. Quand une menace apparaissait, susceptible de tuer des millions d’individus, la science l’éteignait si vite qu’elle s’éloignait avant même d’avoir œuvré. La science était désormais ce « mouvement qui ceint plus vite l’univers ».

Alors évidemment, la pollution était devenue phénoménale. La crise des déchets, la qualité de l’air, les catastrophes nucléaires et naturelles…Toutes ces choses occupaient les fils d’info presque quotidiennement. Mais rien n’y faisait. La population ne diminuait pas. Le recul de la vaccination avait bien fait frémir l’espérance de vie, comme la consommation délirante de drogues. On ne vivait pas nécessairement plus vieux, on pouvait même mourir beaucoup plus jeune. Mais la démographie l’emportait toujours.

Quitter la Terre était donc un objectif non seulement possible mais indispensable. Le ton de Mercury Voskhod se faisait plus véhément, moins charmeur. Avec une pointe de menace. La Compagnie réussirait là où les politiciens avaient échoué. Discipliner enfin les populations instables, qui ne voulaient plus s’éduquer, qui ne pensaient plus qu’à se perdre dans le divertissement. Le plus étrange c’est qu’il omettait de dire que les créateurs de l’économie numérique étaient largement responsables de cette situation. Un effondrement collectif.

« Dans le monde sensible on peut voir cependant le mouvement du ciel devenir plus divin à mesure qu’il est plus éloigné du centre ».

Il n’y avait plus de monde sensible depuis longtemps. Même plus de divin à dire vrai. Ces types avaient permis aux psychopathes de devenir des références comportementales, ils arrivaient maintenant avec leur projet fantastique et leur morale salvatrice.

Ils avaient raison bien sûr. C’était devenu n’importe quoi. Et épouvantablement fragile. Les dictatures avaient su utiliser les progrès technologiques stupéfiants pour se renforcer et mettre les démocraties à genoux. Mercury Voskhod ne pouvait cependant pas ignorer que ses homologues avaient façonné ce monde de dingues…Je crois qu’à ce stade, il s’en foutait totalement. Je crois même qu’il se foutait totalement de nos libertés et de notre santé mentale.

« Je te dirai, fit-il, et sans que tu demandes, ce que tu veux savoir, car je viens de le voir ».

Il avait vu l’exploitation minière de la Lune. Il avait vu le dégoût suicidaire des populations riches et libres, devenues tellement contradictoires et immatures. Peut-être que lui-même ne se sentait pas si bien. On disait parfois que certains patrons du secteur numérique étaient maintenant totalement cinglés. Certains avaient fait construire des bunkers pour se mettre à l’abri d’une guerre globale, d’autres avaient investi dans des engins volants pour fuir en cas de révoltes. La peur au ventre d’avoir à se justifier pour tout le mal causé. Les fous furieux étaient dans la nature et derrière leurs écrans. Prêts à dégainer, virtuellement ou pour de bon.

Pourtant, on était à deux doigts de tutoyer l’éternité, de vivre hors de toute limite, « hors des bornes du temps ». C’était un fait. Le jeu – maudit – en valait sûrement la peine.

En suivant encore et toujours, le déroulement de cette session d’infos qui s’annonçait sans fin, j’avais de plus en plus l’impression de sombrer dans « un fleuve de clarté qui fait douter les sages, dans un miroitement de feux, plus grands ou moindres ».

Les images de ce qui serait la base-vie des premiers ouvriers lunaires s’incrustaient dans ma conscience. La modifiant pour toujours. Mon voisin s’excitait de plus en plus et s’était mis en tête de m’expliquer l’objet précis de son activité. Il ne le savait que depuis ce matin. Il venait de recevoir un message personnalisé de la Compagnie. Dans le mail qu’il avait reçu, et qu’il me transmettait, je lisais cette phrase :

« On ne réside pas par son propre mérite…Mais par ce que l’on accomplit pour l’humanité ». Je lui répondais poliment par transmission quasi-télépathique qu’il pouvait être fier de lui. Je me disais, en prenant soin de bloquer la diffusion de ce sentiment, que la Lune valait bien les esprits de tous ceux qui étaient morts devant leurs écrans.

Là-haut il y avait déjà, depuis quelques décades maintenant, un village lunaire que l’Europe avait crée et qui était occasionnellement habité. La Chine avait développé de son côté une base lunaire, et avait même créé une zone-économique « Terre-Lune », embryon de ce qui allait connaître un développement fulgurant. Les Etats-Unis semblaient avoir pris l’ascendant définitif en étant le pays accueillant le siège de la Compagnie. Même si la communication de la nouvelle entreprise spatiale prenait soin d’englober toutes les puissances économiques. Elle présentait la Compagnie comme une sorte d’Organisation des Nations Unies. Une nouvelle entité transnationale.

 

Texte et image :  Yan Kouton

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La Nuit Semblait Venue (4)

22 vendredi Mar 2019

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La nuit semblait venue, Yan Kouton

Yan 4

                                                     (Une Heure sur Terre)

Je regardais le soleil venir au monde. On ne devrait pas se lasser d’un tel spectacle. Je ne sais pas pourquoi je pensais cela.  J’appartenais à une espèce ravagée par le mal-être, le questionnement métaphysique et la destruction. Enfin, c’est l’image que l’on avait de nous-même. Que la fameuse mélancolie occidentale avait forgée au fil des siècles. Pourtant la nature c’était aussi le cancer. Maladie que l’on avait vaincue récemment dans toutes ses variantes. On pouvait raisonnablement être fiers de nous. Cette victoire on la devait à des hommes aussi volontaires et acharnés que ceux qui avaient crée la Compagnie. « Il ne faut jamais douter face au progrès ». Les émissaires de la multinationale balayaient les quelques critiques qui fleurissaient ça et là et assénaient cette évidence avec la force d’une loi nouvelle. La leur. Ils savaient que ce monde leur appartenait désormais.

Malgré tout, je n’étais pas sûr que l’espace, et plus simplement la Lune, soient des endroits plaisants.

Je regardais le soleil venir au monde. Et la rue s’animait. Plus lentement qu’à l’accoutumée. Les gens ne parvenaient pas à quitter leur domicile. Hypnotisés par l’information. Les premiers ouvriers lunaires seraient à l’œuvre dans moins d’un an. Ils partiront d’une base installée aux Etats-Unis. Elle était déjà construite et opérationnelle. Elle avait servi jusqu’à présent aux vaisseaux-cargo détachés au ravitaillement de la Station Spatiale Internationale. Cette dernière n’avait cessé de prendre de l’importance. Mais son existence était toujours restée nébuleuse pour la plupart des terriens.

Tellement nébuleuse que le changement d’échelle dans la conquête spatiale nous avait totalement échappé. Les nouveaux vaisseaux, ceux qui permettraient l’acheminement des hommes et du matériel étaient présentés dans ce programme spécial et mondial. Ils ressemblaient aux engins spatiaux que l’on pouvait connaître, mais d’une taille autrement plus importante. Il me faisait peur. J’étais rattrapé pour une frayeur sûrement indécente alors que la joie semblait envahir la planète. Les vaisseaux étaient monstrueux. L’énergie qu’il faudrait pour les propulser et les faire revenir sur Terre, comme de vulgaires camions, dépassait l’entendement. Les émissaires de la Compagnie expliquaient qu’elle était sans danger pour l’environnement terrestre. Tout juste fallait-il s’attendre à une très légère aggravation de l’état de l’atmosphère. Elle serait temporaire et les bénéfices attendus de l’exploitation de la Lune effaceraient à terme les impacts mortifères de la destruction économique de la Terre.

Des siècles à exploiter les ressources terriennes. Des siècles qui laissaient notre environnement exsangue. « Réparons notre Terre », tel était le slogan qui s’affichait maintenant, comme un mantra,  derrière les intervenants officiels. « Le joyau demeurant toujours dans son écrin », voilà ce que devait redevenir la Terre.

Un instant je me déséquipais. Abandonnant mes différents outils électroniques et accès internet. Je redevenais un humain pré-numérique. Un d’avant l’intelligence artificielle et la réalité augmentée. Ne disposant que de son cerveau pour appréhender l’existence. Sa « mortelle mesure ». L’arc ardent de l’informatique, qui s’était transformée au fil des années en véritable extension globale du vivant, ne m’entourait plus. Je me sentais nu. Vulnérable. Le silence était certainement ce que nous avions perdu en premier. Il était devenu progressivement impossible de s’entendre et d’écouter. On nous promettait à présent le silence cosmique. Comme « détaché des liens d’un monde trompeur ». C’est ce que j’espérais de tout mon cœur. Que cette expédition définitive nous ramène paradoxalement à ce temps sans mauvaises envies ni temps perdu. A l’essentiel, en un mot.

C’est tout ce qui étouffait un peu ma crainte.

Mon épouse n’allait pas tarder à rentrer. Ejectée de sa classe pour une folie collective inédite.

Je me rééquipais doucement, pour ne rien manquer des informations glorieuses. Le sourire de l’homme qui apparut au fond de ma rétine ressemblait à un ciel éventré. Le sourire d’un Dieu. Il venait de rentrer dans l’Histoire. Il le savait. Même son calme était habité par une force inouïe. Le sommet de la Compagnie se présentait comme un sauveur. Ce qu’il était, lui et ses collaborateurs. Il n’était que l’un des dirigeants. Mais il avait l’aura nécessaire pour éteindre les doutes et convaincre les foules. Il s’appelait Mercury Voskhod. Il expliquait au monde que la Compagnie était la solution globale aux déséquilibres chroniques. Au « désenchantement ». Il répéta ce mot plusieurs fois.

Sa voix joyeuse et ferme donnait « des ailes au désir ».

Il survolait l’histoire de la Compagnie, appelée à devenir une icône économique absolue. Et pour longtemps. « Car elle surpassait tout ce nous savions. De même que le cours du ciel le plus rapide ».  Il brossait le portrait de l’employé spatial idéal. D’une intelligence exceptionnelle, surdiplômé, sportif. Même l’emploi le plus simple prendrait sur la Lune une dimension prodigieuse.

J’imaginais très bien le sort des chômeurs longues durées et sans formation valable la plupart du temps. J’étais personnellement invalide mais j’étais artiste et ancien juriste de haut niveau. Ce statut hybride m’ouvrait un champ des possibles qui ne me condamnait pas. Mon asile premier était l’art. Il survivrait. Même au fond d’un abîme, il survit toujours.

Depuis quelques années, il était d’ailleurs fréquent que des peintres ou des sculpteurs soient sollicités pour céder des œuvres destinées à constituer un véritable musée lunaire. Jusqu’à présent elles étaient dépendantes d’engins utilitaires, disséminés à la surface. Mais il était question de les rassembler à terme dans un « bâtiment ». La Compagnie se proposait maintenant d’en être le mécène.

Toute l’ingénierie marketing soigneusement élaborée depuis des décennies se déployait avec enthousiasme. Une ardeur dont on avait perdu l’habitude. L’actualité n’était plus que le compte-rendu d’une guerre civile planétaire. On ne savait plus précisément quand elle avait démarré. Un genre de guerre de cent ans, probablement. Amplifiée par l’apparition et le développement des réseaux internet. Encore aggravée par son perfectionnement vicieux. Suivre l’actualité se résumait à démêler le vrai du faux. Tout était devenu sujet à caution, depuis que tout un chacun pouvait fabriquer de fausses vidéos, plus vraies que nature, inonder le web d’informations saugrenues, d’études contrefaites et dangereuses. La raison ressemblait à un homme abattu.

Tout ce qui avait contribué à créer cet état général de violence et de confusion absolue semblait se mettre en ordre de marche pour l’exploitation de la Lune. Des groupes dissidents se mettaient en place, les funestes complotistes entraient déjà en action mais leurs actions s’écrasaient contre le mur technologique érigé par la Compagnie. Des sites connus pour répandre des fakes news à la chaîne étaient soudainement déconnectés. Il paraissait évident que cette violente contre-attaque, qui se jouait en même temps que la présentation du plan de recrutement lunaire, était orchestrée par des services des renseignements. La nature de la Compagnie se complexifiait.

Je luttais contre un mal de tête depuis des années. Je vivais, comme tout le monde, dans cet enfer où « l’âme ne se rend plus jamais à ses devoirs »…Et là, ce matin, dans ce déferlement, je rêvais de retrouver ma chair. De sentir mon corps, de l’éprouver. On nous promettait une énergie éternelle, des gisements spatiaux illimités. Et je rêvais plus que jamais de me promener près de la mer, ou de partir au hasard dans Paris. Ces paysages-là, je ne sais pas pourquoi, je les sentais menacés. Presque négligés.

 

Texte et photo : Yan Kouton

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