
L’acte d’écrire.
Cela vient du désir de « faire comme », cela vient de l’envie de reproduire.
Parfois, cela surgit comme une nécessité, comme quand, enfant, nous tirions sur nos bras et nos mains, accroché à l’arrête de la table pour nous mettre debout. C’est le soleil de l’aube, le mitan du jour, le crépuscule d’hiver et la nuit profonde et sourde, toujours la nuit. Alors cela devient un jeu, on fait quelques pas, on tombe, on se lève à nouveau. Et puis, doucement, les mots nous font « marcher ».
Je ne me souviens plus très bien qui a tenu ma main pour que je puisse marcher sur les deux guibolles tremblantes d’un vocabulaire se cherchant et d’une syntaxe amoureuse découverte. Une main de mère, une main de père, un poète maudit inconnu de la terre qu’il décrivait si bien, ou Baudelaire, Verlaine, Musset, Rimbaud …? Ou même cette main crasseuse dans le bout de la nuit, ou celle d’une Amérique rêvée et désirée quand on est adolescent hirsute des rêves plein les cheveux ? Je ne me souviens plus.
Mais, un jour blanc, j’ai écrit. J’ai écrit sous le regard aigu d’un maître d’école surveillant les ratures une règle à la main. J’ai écrit, trempant la plume dans l’encre de la joie, dans l’application des cursives du doute, tirant la langue de côté à la lumière de mes premiers désirs. J’ai écrit pour ma mère et puis pour toutes les jeunes filles fraîches de mon adolescence et encore pour toutes les aimantes femmes, sur ma route, vivantes, s’asseyant avec moi. J’ai écrit des chansons pour honorer des luttes, pour cracher sur les hommes ou pour leur faire l’amour. J’ai écrit dans le noir, j’ai écrit des bêtises. Qu’importaient les erreurs puisque l’acte était là, puissamment présent dans l’aube de toutes mes joies, cette folie-jolie du stylo attaché à mes doigts hésitants.
Et le temps a passé, toujours la peau tachée le matin ou le soir d’un peu d’encre inventive.
Je n’ai rien édité. Bien sûr, j’en ai rêvé, mais dans un lointain de brumes sèches. J’avais petite soif pour qu’on m’entende un jour.
J’ai eu besoin d’oreilles. Alors, c’est par la parole de la langue vivante, par le chant essoufflé de mes cordes vocales que naquit Zakane (ou bien un autre nom, peu importe). J’avais le résultat de griffures offertes à un papier froissé, l’échéance des vocables passant par un micro.
Ce jour, mes mots sont sous vos yeux. Ils ont quitté l’espace domestiqué par moi, un blog sur lequel quelques regards aveugles et solitaires ont cherché la tendresse d’une compagnie furtive. Il aura fallu « la toile », lieu de virtuels échanges ou partages, pour qu’une âme aiguisée passant sur mes écrits vienne tout doucement me glisser à l’oreille un mot, un simple mot : « livre » !
Alors, je l’ai livré, mon « dire ».
Je l’ai livré à Jan Doets, éditeur et papa de « QazaQ », cette belle édition naissante dans les couloirs du net.
Merci à toi, Jan, merci de ta confiance et de ta légèreté.
Bonne lecture à toutes et tous. Belles heures !