LUI

J’entre dans mon jardin,
ma sœur, ô ma fiancée,
je récolte ma myrrhe et mon baume,
je mange mon miel et mon rayon,
Je bois mon vin et mon lait.

Mangez, amis, buvez,
enivrez-vous.

ELLE

Je dors mais mon cœur veille.
C’est la voix de mon bien-aimé. Il frappe.
« Ouvre-moi, ma sœur, mon amie,
ma colombe, ma parfaite !
Car ma tête est couverte de rosée,
mes boucles des gouttes de la nuit. »

J’ai ôté ma tunique,
comment la remettrai-je ?
J’ai lavé mes pieds,
comment les salirai-je ?
Mon bien aimé a passé la main sur la fente,
et pour lui mes entrailles ont frémi.
Je me suis levée pour ouvrir à mon bien-aimé,
et de mes mains a ruisselé la myrrhe,
de mes doigts, la myrrhe s’est répandue
sur la poignée du verrou.
J’ai ouvert à mon bien-aimé
mais mon bien-aimé avait disparu.
J’ai défailli à ses paroles.
Je l’ai cherché mais ne l’ai point trouvé,
je l’ai appelé mais il n’a pas répondu.

Les gardes m’ont rencontrée,
ceux qui font la ronde dans la ville.
Ils m’ont frappée, ils m’ont blessée,
ils m’ont enlevé ma mantille,
ceux qui gardent les remparts.

Je vous en conjure, filles de Jérusalem,
si vous trouvez mon bien-aimé,
que lui direz-vous ?
Que je suis malade d’amour.

CHŒUR

Qu’ a donc de plus qu’un autre, ton bien-aimé ?
O la plus belle des femmes ?
Qu’ a donc de plus qu’un autre, ton bien-aimé,
pour que tu nous conjures de la sorte ?

ELLE

Mon bien aimé est blanc et vermeil.
Il se reconnait entre dix mille.
Sa tête est d’or,
ses boucles sont flottantes,
noires comme le corbeau.
Ses yeux sont des colombes
au bord des cours d’eau,
se baignant dans le lait,
Posées au bord d’une vasque.
Ses joues sont comme un parterre d’aromates,
des massifs parfumés ;
Ses lèvres sont des lis,
la myrrhe en ruisselle.
Ses mains sont des sphères d’or
incrustées de pierres de Tharsis ;
son ventre une masse d’ivoire
Couverte de saphirs
Ses cuisses, des colonnes d’albâtre
Posées sur des bases d’or ;
son aspect est celui du Liban
beau comme les cèdres.
De son palais se répand la douceur,
tout en lui n’est que charme.
Tel est mon bien-aimé, tel est mon ami,
Filles de Jérusalem.

Texte/Traduction : Carol Delage

Illustration : Carol Delage