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Volets clos. M. longe les murs de pierres, éclairé à l’écran du téléphone comme à la torche dans une grotte. M. est une silhouette qui marche… ou seulement une ombre qui ne suit plus personne… ou l’homme de toute ombre disparue dans le noir, quand la mèche s’éteint.
Au bout du couloir, trois esprits Phước Lọc Thọ interpellent M. : échappés d’un conte d’enfant ils dressent leurs corps de porcelaine devant lui. M. reçoit leur anathème tel un crachat en pleine face. De quelle hérésie le condamnent-ils ?
Trois livres sur une table retiennent son attention. Leurs couvertures sont blanches de nom, de titre. Vierges de lecture, ils n’attendent plus de lecteur. Dans leurs pages désertées de mots, règne l’écho des voix ensevelies aussitôt adressées au silence.
Jusqu’ici M. croyait n’avoir jamais cru en Dieu. Aujourd’hui, il ne peut ignorer sa présence, son jugement. Le Christ à l’entrée du village lui revient à l’esprit. Cherchait-il à le prévenir ? Le prie-Dieu l’appelle à s’agenouiller, se soumettre et confesser un péché dont il ne se souvient pas. Comment se décharger de son poids, ignorant tout de la faute, du crime commis ?
Son air si neutre pourrait prendre les traits de n’importe qui, même ceux de M.. Il s’approche du portrait, cherche à déceler dans les yeux leur dernière vision. M ne voit rien… rien que de la peinture.
Texte et photos : Anh Mat
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