Rien ne m’est sûr que la chose incertaine.
François Villon
Les iles à la dérive Hemingweinnes,
La route de Cabriola Malcolm Lowrienne,
Le Tokyo Montana Express Brautiganesque,
Le transsibérien où se trans-prose le jeune Blaise,
Les blessures du cœur rousseauiste,
Et les griffures sentimentales à l’endroit
De la carcasse épuisée de Georges Perros.
J’y songe.
Enfin, ma chambre d’hôtel que je voudrais à l’année
Où j’écoute Johnny Hodges,
En m’avouant enfin que jamais je n’ai eu
La bosse du moindre commerce,
Hormis celle, jadis, des hommes.
Mais cette bosse est devenue blessure
Jamais refermée même par temps de jazz,
Et dans le for, dit intérieur,
Une voix annonce qu’il est temps de se cacher ailleurs,
Car si je ne m’avoue pas vécu, c’est que je ne me sens pas encore vaincu,
Fumant l’une derrière l’autre
Des cigarettes sur Echoes of Harlem,
Quand Oliver Nelson renchérit avec Johnny Hodges,
Et que je ne veux plus craindre d’être envahi par l’Autre :
Cheval de Troie de ma cité intérieure.
Mais là,
Me pique comme un dard
Ce rappel frileux de Gide :
Qui dit mysticisme, dit mystification.
A quoi j’oppose une autre assertion :
Qui dit réalisme, ne dit pas réalisation.
Ces deux natures de l’être,
Mystique et réaliste,
Sont malencontreuses,
Et depuis toujours éprouvées,
Mais est-ce un mal d’être davantage
Mystique que dévot de la raison ?
Rien ne saurait être vrai,
Et ce manque remplit de sa vérité
Mon moi mensonger hypertrophié
Qui se voudrait clocher.
Sagesse folle :
Je me suis tant ennuyé
De m’être sauvé des autres,
Qu’à nouveau
Je désire me perdre en eux.
Texte : Fabien Sanchez