Nous avions déjà parlé de ce poète japonais exceptionnel, publié par les Editions Raz. Aujourd’hui « Haut dans le Ciel » est une réalité. Les Cosaques des Frontières sont heureux de s’en faire le relais.

Voici quelques textes tirés de ce recueil remarquable, permettant la découverte en France d’un auteur ayant traversé le tragique, à l’instar de Celan, et qui, du surréalisme à la transcendance, n’aura eu de cesse d’élever la poésie à son niveau le plus haut. Et sans doute le plus essentiel. Rappelant à quel point la poésie est une confrontation à l’indicible, « à la terre désolée de la contemporanéité », selon les termes de Paolo Lagazzi, livrant une prodigieuse préface. Présentation à la fois de l’oeuvre de Takano – comme le pont entre la pensée poétique occidentale et extrême-orientale – et formidable réflexion sur la poésie en générale.

Je voudrais la parole

Je voudrais la parole

pour mourir

comme l’abîme du fond duquel

on ne remonte plus à la surface

après le saut insensé,

comme la montagne de laquelle

on ne redescend jamais

après l’avoir escaladée.

Je voudrais la parole,

soit profonde soit élevée,

pour mourir convaincu.

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Effondrement

L’âme de chacun de nous

a beau être invisible,

elle a ses montagnes escarpées et ses précipices

dont personne n’a escaladé la cime,

que ne survole pas même un oiseau,

où il n’y a ni route

ni borne milliaire.

Rien d’autre que d’arides montagnes!

Seul celui qui médite

dans un profond silence

réussira tout juste à percevoir

un bruit d’effondrement.

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Textes : Kikuo Takano

Un grand merci à Philemon Le Guyader.