les fleurs de rêve tintent, éclatent, éclairent
Arthur Rimbaud, Les Illuminations
Pour Jean-Jacques Brouard
Dans l’oubli il y a des consolations incertaines
mais on n’avance qu’en perdant la mémoire.
Les peurs déraisonnées parsèment comme une pluie
le passé, sans que l’on parvienne à briser leur banquise:
envie de permanence qui alourdit l’espoir d’un fleuve.
On se perd toujours dans les rêves mais le matin arrive
et nous libère du poids des mondes à construire.
Il ne nous reste que le jour pour que la route soit neuve
dans l’attention démesurée que l’on prête aux paysages
qui semblent se construire au fil de notre marche:
des ponts suspendus dont le bois attend et craque,
le ciment fissuré d’une usine hors d’atteinte,
les rails en manque du poids qui les écrase;
on se retourne et rien ne subsiste,
et parce qu’on s’efforce de retracer les heures
on avance et on dessine un tintement que personne n’espère.
Texte : Miguel Angel Real