Entre les murs le temps cliquète et claquent les voix.

Il suffirait d’une clé parfois pour que frémissent les rayons de la reconnaissance,

mais l’humanité se tient, déesse rigide, très haut dans l’air confiné de la prison.

La nuit s’écaille laissant les phrases inachevées des hommes se fondre dans le bruit mat des portes.

Inlassablement pour eux, l’horloge indiquera l’heure de la sortie toujours refoulée comme avec les vagues les morceaux de ferraille des rafiots engloutis.

Quand leur regard ne perçoit plus rien dehors au-delà des corbeaux, abrutis,

ils s’installent parmi la bousculade laissant la lumière bleuir le maquis lointain

sous les coups de l’hiver.

La blancheur moite étouffe toute blessure ; ne subsistent plus que les souvenirs ancrés dans les chapelles obscures où ils prient sans même le savoir.

Pourtant l’espoir se dresse où chaque barreau s’invite, et s’ouvre le portail du temps à ces loups orgueilleux dont les yeux réfléchissent toutes nos cicatrices.

Entre les murs le temps cliquète et claquent les voix.

Au milieu de l’infini, une porte s’est ouverte.

Aux nuits succèderont les nuits, heureusement peuplées de phrases surgies des livres.

Et la lecture pénètre la brèche où est éclose la fêlure pâle de l’évasion, celle de l’écriture où se faufile le tissu de leur vie rédigée avec peine, parfois avec effroi, mêlant à leurs désirs nouveaux des rêves de futur.

Ainsi fuient-ils l’ennui et sèchent-ils leurs larmes de papier.

Désormais, ils ne baisseront plus les paupières.

 

Texte : Marlen Sauvage