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David Bowie

David Bowie aura été la dernière personne à demander s’il y avait de la vie sur Mars sans susciter un vilain ricanement de ma part. Il aura été bien autre chose mais cet homme qui venait d’ailleurs surgissant sur l’écran de télé du pasteur et chantant  Life on mars ? en 1973 aura déclenché pour la première fois de ma vie un véritable coup de foudre artistique, une émotion sans équivalent et sans influence.

 

Oui, je déroge aux règles édictées par moi-même. Marre du futur antérieur suivi de la dernière personne à, envie de me complaire à la nostalgie des premières fois. Jamais je ne pourrai purger ma passion pour Bowie et sa musique. Quant au futur antérieur, il faudra bien lui consacrer un paragraphe entier non comme tiroir verbal mais comme déclencheur de pastilles kinesthésiques.

 

La pastille se situe à dans une petite ville du Surrey, à Banstead, chez le pasteur, devant la télé, aux côtés de Kathrin, ma correspondante anglaise, pendant « the Top of the Pops » ; je vois et j’entends pour la première fois David Bowie chantant Life on mars ? Sidérée par cette créature bleue, rousse à la voix si étrange, à sa musique quand elle s’échappe dans des harmoniques  jamais entendues jusqu’à lors, je ne peux détacher mes yeux de la créature. J’apprendrai beaucoup plus tard, que la chanson est une réponse à un succès raté, David Bowie ayant abandonné l’adaptation en anglais de Comme d’habitude de Claude François – dont les costumes vieillots provoqueront chez ma correspondante venue à son tour en France un fou-rire mémorable – et qui reprendra une partie des harmonies de la chanson française.

Contrairement aux apparences, David Bowie n’aura jamais eu les yeux vairons mais une mydriase – dilatation permanente de la pupille de l’œil gauche lui conférant cette couleur plus sombre – due à un coup de poing de son ami George Underwood alors qu’ils ne sont encore que des ados.

Contrairement aux apparences et à ses différents avatars, David Bowie n’aura jamais été que lui-même. Il aura maîtrisé son image jusqu’au bout et mis en scène sa mort de son vivant, de son vivant entièrement. Je n’aurai pas beaucoup écouté le dernier album, Black Star, malgré sa beauté  tragique.

Contrairement aux apparences, je ne l’aurai pas idolâtré. Simplement, je l’aurai adoré comme le dieu qu’il était – la différence entre adoration et idolâtrie est ténue mais sensible. J’aurai particulièrement aimé chez lui la période  Ziggy Stardust, pour les chansons celles qui touchent aux étoiles, « Starman » par exemple et ce moment où la voix se casse après « He told me » :

Let the children lose it
Let the children use it
Let all the children boogie.

Je ne l’aurai vu qu’une seule fois sur scène et encore… de très loin à Paris, en juin 1983 à l’hippodrome d’Auteuil… Rendez-vous raté dû à la mauvaise qualité de la sono de l’écran géant envolé avec le vent.

Grâce à deux astronomes belges, Bowie a sa constellation dans l’espace, sept étoiles en forme d’éclair (voir pochette d’Aladdin Sane dans le voisinage de Mars et l’on peut inscrire son morceau préféré sur un site Stardust for Bowie. Il me semble opportun d’arrêter là. L’exercice hagiographique a ses limites.

 
Texte : Christine Zottele