A l’occasion de la sortie de son recueil Banlieue Ville, Aline Recoura sera en lecture le 30 janvier prochain à « La Lucarne des Ecrivains« .
Nous profitons de cet évènement pour présenter deux nouveaux textes qu’Aline Recoura a bien voulu réserver aux Cosaques.
Y’a pas d’âge
Aimer par corps à coups de cœur
je ne veux pas de maison élue domicile
un carrelage froid une pièce abandonnée
un duvet des draps usés un peu de café
lune soleil dardant leurs lumières
muscles poils et sueurs saveurs
odeurs d’un logis où vivent les bougies
soupe sur le feu poireaux carottes navets
pommes de terre à feu moyen
feu fort rougit les seins nues
ébouriffe les cheveux de nos danses
Un doux cœur à cœur
galop féroce dans l’entrée
chatte dormante sur le coussin
de l’eau à la lave j’attends à toi
tes souffles ténus tendus retenus
en flux tendus à peau carrée
œillades répétées aiment
affolées par mon port de tête et mes os fins
Ta tête amarrée sur mon pubis
j’exile mes pensées dans l’écume
les suit les laisse flotter
la mouette en moi sur l’eau salée
retrouvée en notre amour
ma bouche te calme avant
avant la bête vive qui mord
En notre amour une expérience
la mort qui pousse dans l’intense
comme vent fort dans les voiles
conscience de la disparition
la mort à nos trousses surveille
garder les étoiles en attraper les pointes croquer
gourmandise avalée-léchée-pelée-sucée
embrassée en mémoire ce qui n’a pas été fait
aimer sur le tard comme nouveau mot adulescent
s’embrasser dans la rue se prendre la main se toucher
se toucher tout le temps savourer
ça existe bien ce corps on peut le palper le serrer
il veut faire qu’un comme avant la naissance
on s’en fou des antinomiques morales de l’amour
on s’aime tard comme si c’était trop tôt
on s’aime ado comme si c’était trop beau
ça dure les draps défaits la nudité
la peau cajolée ensorcelée de tours
magie de nuit magie de jour
y’a pas d’âge pour l’amour
*****
Y’a du Sang
Y’a du sang
dans ma douceur
Y’a des révoltes
dans les fleurs
Y’a un coeur
rouge vibrant
strié de noir
aux cauchemars
récurrents
Y’a la perte
y’a le temps
y’a toi
rayonnant
à la plage
au milieu
de trois enfants
y’a la peur
de baisser les bras
de pas y arriver
y’a la hantise
qu’un jour tout soit fini
qu’un jour
on ne s’entende plus
qu’un jour
on ne s’aime plus
Y’a la bourrasque
des inconnues
dans le sommeil
très agité
Y’a du sang
dans mes cauchemars
des abandons
des têtes passées
des bébés crocodiles
des grenouilles qui se noient
des sens sensation d’effroi
Y’a de l’eau
des aquariums
des mots qui planent
des voix
mais qui fait le premier pas d’habitude
Y’a les déchirements
les hurlements
la douleur
l’impuissance
à accepter
l’abandon
le désamour
Y’a tant de cris
dans ma douceur
tant
et tant
silence
de mon air
je ne fais jamais beaucoup de bruit
Sang silencieuse
mon coeur explose
quand dort
le reste du corps
Textes : Aline Recoura