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Ce serait dans la rue envahie de lumière, sur l’ombre qui joue avec les murs, l’incision de pierres blanches, ou de dunes géométrisées, qui soutiennent le gris humide de la plage immense, une flèche d’eau d’un sombre bleu glauque frisé de petites lignes d’écume et l’envol infini d’un ciel très doux où vont des nuages blanc sale.
Ce serait, sur une terrasse obscure, liaison entre la rue et cet ailleurs où circulent calmement, dans le vague d’une vacance, de minuscules silhouettes imprécises, de grands enfants potelés et deux petites nageuses, ou plutôt deux femmes assises dans le confort de leurs formes, le plaisir de leur bavardage et de très sages tenues de plage.. et ce serait, dans le ciel, ou à côté, une pépé de feu toute de traits et d’esprit.
Ce seraient les plantes de pied qui sentiraient le passage de la douceur tiède du sable qui s’effondre un peu sous les pas au claquement, la fermeté froide, la résistance, le rebond, allégeant la marche.
Ce serait cette satanée eau qui s’en est allée si loin, et le souvenir de la mer clapotant immuablement, ou presque, sur quelques galets, là bas, avant, dans le sud.
Ce serait ce qu’on ne voit pas sur l’image, il faudrait sans doute traverser la rue et ses galets, il faudrait que cela soit visible, même de près, mais ce n’est peut-être pas là, le peintre l’a peut-être effacé de sa vision, alors qu’il a repris les bords déliquescents en gris des nuages, ce serait le beige sombre, le brun clair, du sable humide légèrement lumineux et de plus en plus foncé, brillant comme un amas de paillettes sombres, en s’approchant de la première langue de l’eau.
Ce serait l’enfance ou l’adolescence jubilant, le monde offert, la liberté, la joie de l’air avec lequel faire la course, le souffle de la mer comme un profond chant en sourdine et le grelot des petits rires qui s’envolent.
Ce seraient la jeunesse, les peines, les joies secrètes, les années qui passent, en marches méditatives, un refuge secret perdu dans ce grand spectacle.
Ce serait l’amour de la mer qui dort, juste sous la conscience, en chacun.
Texte et photo : Brigitte Celerier