L’écriture précieuse et ciselée d’Anna Jouy a irradié les Cosaques des Frontières longtemps. Depuis l’origine du site, sous le regard et l’intelligence de Jan Doets. Elle n’a jamais cessé, ensuite, de nourrir le site de textes et recueils renversants. Et ce n’était qu’une partie de son oeuvre, immense dans tous les sens du terme. Elle demeure, et va maintenant infuser. Comme elle le mérite, et comme elle doit le faire.

Les Cosaques des Frontières sont le réceptacle d’une partie de ses écrits, et vont poursuivre ce patient travail de passeur. Car c’est une œuvre qui doit désormais être gravée dans le temps. Je n’aurai, à titre personnel, plus la joie de recevoir régulièrement de ses nouvelles et ses mots si beaux, si profonds. Même si la lire, et le relire, est la plus belle manière de garder sa présence essentielle.

Yan Kouton

Voici « Sables », le tout dernier texte de son magnifique recueil « Le Plénum des Sargasses » – Bloc 10.

Incompréhen-sable dit le temps qui ne peut rien garder pour lui. Je suis venue le cœur sur son duvet de plumes, éphémère, le temps d’un seul instant, à la couture des choses. Sans atout dans les mains. Pourtant je m’étais assez joliment parée de tendre et de violence, ailes et serres. J’en avais fait des chapelles où chantent les encensoirs, fallait bien, dire de belles choses pour faire caresses. Mais il y a des présents qui ne savent séduire. Le monde est un jardin d’enfants gâtés. Incompréhen-sable. Et maintenant l’usure, la peau en grains des grains de peau. Ma douceur est aux pierres à la meule. Je broie ma suite de temps à coups de sablier.