il y avait cette chanson
de variétés comme on disait
C’était le temps des fleurs
tu portais des chignons
et prenais des cours d’ikebana
l’art de faire vivre les fleurs
tu l’avais déjà au bout des doigts
à la MJC de L’Isle-Adam

tu adorais les orchidées
autant que je les détestais
elles sont toutes mortes
pendant ton absence
on a cherché longtemps la disparue
celle que ton petit-fils t’avait offerte
du même rose que les cheveux d’Octavie
On ignorait la peur

voici un sélam de tes fleurs préférées
la messagère des dieux – bonnes nouvelles
iris – j’avais repéré des bicolores sur un rond-point
pas eu le temps de les cueillir – la faucheuse
t’a cueillie avant que tu en fasses des boutures
bonne nouvelle : ton seringa fils du mien
garde mémoire de son parfum
Les lendemains avaient un goût de miel

tes roses jamais aussi belles
qu’en ce funeste mois de mai
– et pas seulement les Ronsard –
chantent leur rosière
Ton bras prenait mon bras
Ta voix suivait ma voix
saurons-nous faire survivre
tes survivantes – les blanches de l’hôpital
à nous confiées pour être mises en pot
on ne sait même pas leur nom

fleurs de lavande
dans ce sachet retrouvé
l’étiquette fait mention de cette belle journée
à Forcalquier après ce voyage dans l’air bleuet
en montgolfière en famille – papa avait dit : « Pas malin,
si ce foutu ballon tombe, plus personne ne portera notre nom ! »
on avait ri
On était jeune
et l’on croyait au ciel
Place du Rempart, un autre sureau
– en ai découvert un chaque jour –
dont les dernières fleurs font le régal des fées
– mais pas de champagne cette année –
c’est presque le temps des fruits
petites pommes vertes dans ton jardin
et cerises amères et grenades
et le figuier au bout de la rue
mai s’achève pas notre chagrin
c’était le temps de tes fleurs
maman, t’es où ?

Texte : Christine Zottele