Peter O’Neill est un brillant poète irlandais, auteur de nombreux recueils, admirateur de Baudelaire et de Beckett. Il a traduit quelques textes de Yan Kouton, traductions que l’on peut notamment retrouver ici.

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Yan Kouton a de son côté commencé un travail de traduction des textes de Peter O’Neill.

Cette collaboration s’est prolongé avec le recueil de Peter O’Neill, « Henry Street Arcade », traduit en partie par Yan Kouton. Nous en présentons un extrait. Ce recueil sera publié très probablement par les Cosaques dans son intégralité.

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The Patriarch

 The envelope arrived with its stamp

To commemorate the Easter rising.

There was no trace of her family name,

Which she had kept and which he had always

 

Taken umbrage to, despite the fact that

They had been married now for over

Eleven years. “The Prick!…”, he uttered.

It was no longer funny, and to add

 

 

Insult to injury the card was bare,

But for a mere signature, scribbled

Beneath the generic birthday greeting.

 

 

It was his hallmark; absence in presence.

Yeats had always said it, after every

Revolution they then turn on their own.

 

 

Le Patriarche

L’enveloppe est arrivée sous pli cacheté

Pour commémorer les Pâques Sanglantes.

Il n’y avait aucune trace de son nom de famille,

Qu’elle avait gardé et qu’il avait toujours

 

Contrarié, en dépit du fait qu’

Ils soient mariés maintenant depuis plus de

Onze ans. «Le connard! …», dit-il.

Ce n’était plus drôle, et d’ajouter

 

A l’insulte la blessure d’une carte nue,

Une bête signature, gribouillée

Sous des vœux d’anniversaire basiques.

 

C’était sa marque de fabrique ; d’être là même absent

Yeats l’avait toujours dit, après chaque

Révolution ils se tournent vers les leurs

  

 

The Grounding

The infinite position is the imminent peril of your emplacement,

Such should be your grounding at every encounter.

For from such a perspective can come the wholly equalling

Level of horizontality, allowing you to lie down with another,

Totally unencumbered by the impossible trappings

Of the forbidding echelons of absolute emptiness;

Doom spheres spawning vertical nausea.

Hourly calculations of liquid ice flows.

Sea changes involving continents of plastic,

Inside which swim fish with hardening anatomy.

The menu on offer will induce testicular cancer.

So, lie back with him/her and enjoy the tantalising notion

Of your sheer vulnerability; how they might kill you with but a word.

Or, for all your days, help you to finally reconstruct the world.

 

 

Le Fondement

L’infinie position est l’imminent péril de votre situation,

Telle devrait être votre assise à chaque rencontre.

Car de cette perspective peut venir l’égalité complète

L’horizontalité permettant de se coucher avec l’autre,

Totalement libre des pièges impossibles

Des tabous du vide absolu ;

Les cercles damnés engendrant des nausées verticales.

Les calculs horaires des flux de glace liquide.

Les mers portant des continents de plastique,

Dans lesquels nagent ces poissons à l’anatomie durcie.

Le menu ainsi proposé provoquera un cancer du testicule.

Aussi, couchez-vous avec lui avec elle et céder à la tentation

De votre pure vulnérabilité ; ils pourraient vous tuer d’un mot.

Ou, pour le reste de vos jours, vous aider à reconstruire enfin le monde.

 

 

 

Morning Commute

 We climb aboard the commuter train arbeit macht frei

Huddled together on airtight carriages impregnated with

The odour of deodorant, perspiration and cheap perfume.

At 8 AM, the majority of us are mezzo del cammin

 

 Most of us males suffer from intestinal

And bladder complaints, while our female counterparts

Pre-menopausal! Into the gyre of annihilation, in one

Form or another, we descend. The younger amongst us

 

Sleep, as the rest tap nervously on their iPhones.

Only one or two read; we are becoming distinctly

A more eccentric breed, us readers! Because of this,

I become interested in my immediate neighbour.

 

Sockless in brogues, like me she turns the page.

The buttons on her overcoat burn talismanic.

Despite the anonymity some of us can still reach for the sublime.

 

Trajet Matinal

Nous montons à bord du train de banlieue arbeit macht frei

Entassés dans des wagons étanches imprégnés de

L’odeur de déodorant, de transpiration et de parfum bon marché.

À 8 heures du matin, la majorité d’entre nous sont mezzo del cammin

 

 

La plupart des hommes souffrent des intestins

Et de troubles de la vessie, tandis que nos partenaires féminins

Sont pré-ménopausées ! Dans le tourbillon de l’anéantissement, d’une

Façon ou d’une autre, nous descendons. Le plus jeune parmi nous

 

Dors, les autres tapotent nerveusement sur leur iPhone.

Un ou deux seulement lisent ; nous devenons distinctement

Une race excentrique, nous les lecteurs ! À cause de ça,

Je m’intéresse à ma proche voisine.

 

Pieds nus dans des brogues, comme moi elle tourne la page.

Les boutons de son pardessus brillent comme un talisman.

Malgré l’anonymat, certains d’entre nous atteignent toujours le sublime.

 

 

The Big Apple

 O monumental languor, limbs heroic,

Planed and sculpted with quiet amplitude.

Hear the sonority of her stride, it still resonates,

Eclipsing all other visions.

 

Keen magic pouring forth again, the scent of you;

The invisible edifice of perfume.

Senses interrupt, jostle to summon structure,

The smooth banks and pillars of your ivory thighs.

 

This archaeological splendour is ruinous, twofold.

Hypnosis occurring at each breath on the tongue,

You then the demon vocalising at my ear.

 

 

Serpentine- Rapturous- Coiling;

Richly mesmerising with every word.

I merely follow the signs, seeking divination.

 

 Volupté

Ô monumentale langueur, membres héroïques,

Rabotés et sculptés avec une amplitude silencieuse.

Entendez le bruit de sa foulée, elle résonne encore,

Eclipsant toutes les autres visions.

 

 

La magie intense à nouveau, votre odeur ;

Le parfum de l’édifice invisible.

Les sens s’interrompent, se bousculent pour invoquer une structure,

Les banques lisses et les piliers de vos cuisses en ivoire.

 

 

Cette splendeur archéologique est ruineuse, et duale.

L’hypnose se produisant à chaque souffle,

Vous tel un démon murmurant à mon oreille.

 

Serpentine – Excitation – Ensorcellement ;

Chaque mot comme un somptueux sort.

Je ne fais que suivre les signes, cherchant la divination.

 

 

Textes : Peter O’Neill – Traduction : Yan Kouton

Illustrations : Peter O’Neill